La préservation de l’éthique dans la titularité des droits sur les créations intellectuelles des salariés en droit OAPI

Thierry Noël KANCHOP

Chargé de cours à l’université de Yaoundé II

Chercheur au laboratoire d’études et de recherche en droit des affaires

 

La titularité des droits sur les créations intellectuelles des salariés est un terreau fertile pour les pratiques contraires aux valeurs éthiques ; et pour cause, le droit du travail et le droit de la propriété intellectuelle ne poursuivent pas en principe les mêmes objectifs. D’ailleurs, une question fondamentale a de tout temps jalonné la rencontre du droit du travail et de la propriété intellectuelle : celle de savoir qui sera titulaire des droits qui découleraient des créations intellectuelles réalisées par un salarié. La logique économique voudrait que la réponse soit en faveur de l’employeur, le salarié étant rémunéré dans le cadre de son contrat de travail. Cependant, cette logique économique est loin de correspondre à la réalité du régime juridique de la titularité des droits sur ces créations de salariés. De plus, il existe au sein du droit de la propriété intellectuelle deux régimes bien distincts qui ne concilient pas les mêmes intérêts : celui du droit d’auteur qui, par la prépondérance de sa nature personnaliste, a tendance à favoriser l’auteur ; et le régime de la propriété industrielle qui a plutôt pour but d’inciter les entreprises à investir dans la recherche. En optant pour une optimisation de la conciliation entre les divers intérêts en présence, le législateur OAPI entend préserver l’éthique dans la titularité des créations intellectuelles des salariés. À la question de savoir quels sont les mécanismes mis en œuvre par le législateur OAPI pour préserver cette éthique, il faut retenir que le législateur OAPI garantit cette éthique en procédant à une régulation tant légale que conventionnelle de l’influence du lien de subordination sur la titularité de telles créations.

Introduction

La société actuelle est de plus en plus caractérisée par un esprit capitaliste qui conduit les êtres humains à donner, comme but essentiel, à leur vie la conquête de la richesse[1]. Cette conquête   s’est amplifiée avec l’avènement du règne de la démocratie qui a permis d’affirmer le droit égal de tous à la propriété privée. Désormais, chaque homme peut aspirer à devenir propriétaire et à réclamer la protection de son droit de propriété, droit fondamental de l’homme universellement reconnu et consacré[2]. En raison de l’importance de cette propriété individuelle et privée, l’homme a développé, parfois en violation des règles éthiques et morales, le goût de l’épargne, de la fortune et de l’accumulation des richesses. Cet appétit pour la richesse s’est densifié avec l’avènement du règne de l’immatériel. En effet, considéré comme le domaine à partir duquel est pensé et impulsé le développement économique, social et culturel de toute société, l’immatériel envahit de plus en plus nos vies[3], impose partout sa présence[4] et se présente comme « la plus précieuse desressources économiques » [5]. Fondée sur l’innovation, l’imagination et la création[6], la valeur de l’immatériel[7], notamment, des biens intellectuels[8], traduit son fort potentiel attractif et financier[9]. Il n’est donc pas surprenant que la ruée des hommes pour l’acquisition des biens immatériels[10] constitue un terreau fertile pour les conflits interminables et le foisonnement des pratiques déloyales et immorales. C’est pour éviter de tels conflits et pratiques que le législateur OAPI[11] s’est engagé à préserver l’éthique dans la titularité des droits sur les créations intellectuelles des salariés.

Du grec Ethos qui signifie mœurs, l’éthique est originellement synonyme de morale[12], même si elle s’en éloigne de plus en plus sans s’y détacher[13]. C’est un ensemble de conduites considérées comme convenables par la société et qui postulent les valeurs d’honnêteté, d’intégrité, de responsabilité, d’autonomie, de justice, de souci de soi et des autres, de solidarité[14]. Les considérations éthiques innervent le droit en général et le droit des affaires en particulier[15] dans un souci de moralisation de la vie des affaires[16], et plus largement, de la vie économique[17]. Ramenées au droit de la propriété intellectuelle, les préoccupations éthiques renvoient de manière générale à l’honnêteté quant à la titularité des droits, mais aussi au respect des mécanismes de dévolution et d’exploitation des droits conférés sur les réalisations du génie humain. Lorsque ces réalisations sont des créations intellectuelles des salariés, les considérations éthiques sont encore plus poussées.

Les créations intellectuelles des salariés sont des produits de l’imagination et de l’activité créatrice des personnes engagées dans un contrat de travail en qualité d’employé. Pour mieux cerner ces créations, il serait judicieux de les identifier dans la grande mosaïque que constitue la propriété intellectuelle. En effet, le droit de la propriété intellectuelle est généralement divisé en deux branches : la propriété littéraire et artistique et la propriété industrielle. Cette summa divisio de la propriété intellectuelle regorge également des sous-divisions et catégories qui n’obéissent pas toujours aux mêmes principes et fondements. La propriété littéraire et artistique, par exemple, appréhende distinctement le droit d’auteur[18] des droits qui lui sont voisins, appelés droits connexes ou simplement droits voisins[19]. Tandis que l’objet du droit d’auteur est l’œuvre littéraire ou artistique, entendue comme une création intellectuelle et originale dans le domaine littéraire et artistique, les droits voisins, quant à eux, portent sur des choses qui n’émanent pas nécessairement d’une activité créative et qui se présentent plutôt comme des prestations destinées à diffuser les œuvres[20].

En ce qui concerne la propriété industrielle, une distinction s’impose également entre les fonctions des droits de propriété industrielle sur les créations techniques et celles des droits sur les signes distinctifs. Les créations industrielles ont pour but de favoriser le progrès économique et technique. Il existe deux catégories de créations industrielles. Les premières ont un caractère purement utilitaire et influent immédiatement sur le développement économique et technique. C’est le cas notamment des inventions de produits ou de procédés[21], des topographies de circuits intégrés[22] et des obtentions végétales[23]. Les secondes, en revanche, sont de nature ornementale et se présentent comme des créations de forme concernant la mode et le goût. Tel est le cas des dessins et modèles industriels[24]. Tous ces objets de nature industrielle obéissent, certes, à des critères différents, mais procèdent tous de l’activité intellectuelle de l’homme.

Cependant, la protection des signes distinctifs obéit essentiellement à des préoccupations d’organisation de la concurrence[25] et de protection du consommateur[26]. On distingue plusieurs signes distinctifs à l’instar des marques[27], des noms commerciaux[28] et des indications géographiques[29]. Ces derniers ne doivent pas forcément émaner d’une activité intellectuelle ou créative de l’homme, car en pareil domaine, l’exigence de la création, telle que reconnue pour une œuvre littéraire, artistique ou une invention, est inopérante.

Au regard de ce qui précède, on note qu’une création intellectuelle de salarié est une réalisation produite à l’issue d’une activité intellectuelle et créative du salarié tant dans le domaine littéraire et artistique que dans le domaine industriel. Une telle création de salarié peut porter sur une œuvre littéraire ou artistique, une invention de produit ou de procédé, une topographie de circuits intégrés, une nouvelle variété végétale, un dessin et modèle industriel. Ces objets couverts par la propriété intellectuelle possèdent un incroyable potentiel d’attractivité et, ce faisant, une grande valeurfinancière[30]. Ils peuvent par conséquent donner lieu à une exacerbation des pratiques contraires aux valeurs éthiques lors des opérations d’acquisition des droits privatifs. En effet, l’employeur et le salarié étant des partenaires aux intérêts généralement opposés, une question fondamentale a de tout temps jalonné la rencontre du droit du travail et de la propriété intellectuelle [31]: celle de savoir qui sera titulaire des droits qui découleraient des créations intellectuelles réalisées par un salarié. La logique économique voudrait que la réponse soit en faveur de l’employeur, le salarié étant rémunéré dans le cadre de son contrat de travail. Cependant, cette logique économique est loin de correspondre à la réalité du régime juridique de la titularité des droits sur ces créations de salariés. De plus, il existe au sein du droit de la propriété intellectuelle deux régimes bien distincts qui ne concilient pas les mêmes intérêts : celui du droit d’auteur qui, par la prépondérance de sa nature personnaliste, a tendance à favoriser l’auteur ; et le régime de la propriété industrielle qui a plutôt pour but d’inciter les entreprises à investir dans la recherche. Face à ces différences d’esprit, d’intérêts et de logiques, le législateur OAPI a révisé, dans sa dernière réforme, les dispositions sur les créations intellectuelles des salariés. En optant pour une optimisation de la conciliation entre les divers intérêts en présence, le législateur OAPI entend préserver l’éthique dans la titularité des créations intellectuelles des salariés. Dès lors, on est amené à se demander quels sont les mécanismes mis en œuvre par le législateur OAPI pour préserver l’éthique dans l’acquisition des droits de propriété sur les créations intellectuelles réalisées par les salariés ?

Cette question est davantage intéressante lorsqu’on imagine qu’autant le salarié que l’employeur serait tenté de vouloir bénéficier des avantages de telles créations en raison de leur fort potentiel financier. Il faut répondre d’emblée à ladite interrogation en précisant que le législateur OAPI garantit cette éthique en régulant, en fonction des circonstances, l’influence du lien de subordination sur la titularité des créations intellectuelles faites par les salariés. Cette régulation du lien de subordination entre l’employeur et le salarié est porteuse de plusieurs enjeux. D’abord, il est question d’éviter que la dépendance juridique et économique de l’un envers l’autre ne soit une cause d’abus de droit et de marginalisation du salarié, partie faible au contrat. Ensuite, il faut pouvoir récompenser les investissements réalisés par l’employeur sans ignorer le salarié qui, dans une conception personnaliste des droits de propriété intellectuelle, est l’auteur, l’inventeur ou tout simplement le créateur intellectuel. Enfin, il faut sauvegarder un climat de loyauté et de collaboration pacifique entre ces deux partenaires sociaux en leur permettant, au besoin, d’ajuster leurs droits et obligations en fonction de leurs objectifs et besoins spécifiques. Pour parvenir à concilier toutes ces exigences, le législateur OAPI s’est engagé à la préservation de l’éthique à la fois par la régulation légale (I) et contractuelle (II) de l’influence du lien de subordination sur la titularité des créations intellectuelles des salariés.

I- La préservation de l’éthique par la régulation légale de l’influence du lien de subordination sur la titularité des créations intellectuelles des salariés

L’existence du lien de subordination entre l’employeur et le salarié, qui est à l’origine d’une création intellectuelle, affecte naturellement le régime de la titularité des droits sur une telle création. En effet, animé par le succès économique de son entreprise, l’employeur, qui voit dans la propriété intellectuelle une technique juridique destinée à rentabiliser son investissement, est par conséquent porté à revendiquer le bénéfice des droits sur les réalisations intellectuelles des salariés. Toutefois, cette influence du lien de subordination varie selon qu’on se situe dans le domaine du droit d’auteur ou celui de la propriété industrielle. Tandis qu’elle est tempérée dans les créations littéraires ou artistiques de salarié (A), elle paraît plutôt amplifiée dans le domaine des créations industrielles réalisées par les salariés (B).

A- La souplesse du lien de subordination sur la titularité des créations littéraires ou artistiques des salariés

Le souci de concilier la logique personnaliste du droit d’auteur aux enjeux économiques de l’entreprise en droit du travail a conduit le législateur OAPI à un partage des droits découlant de l’œuvre salariée entre l’auteur salarié et l’employeur (1) ; ce qui invite à questionner l’exercice conjoint de ces droits par ces partenaires aux intérêts parfois antagonistes (2).

1- Le partage des attributs du droit d’auteur entre l’auteur salarié et l’employeur

À la lecture de l’article 35 de l’Annexe VII de l’ABR, lorsque l’œuvre est créée pour le compte d’une personne physique ou d’une personne morale, privée ou publique, dans le cadre d’un contrat de travail de l’auteur, le premier titulaire des droits patrimoniaux et moraux est l’auteur, mais les droits patrimoniaux sur cette œuvre sont présumés transférés à l’employeur dans la mesure justifiée par les activités habituelles de l’employeur au moment de la création de l’œuvre. Bien que cette disposition confirme le principe de la titularité initiale de l’auteur sur l’œuvre salariée, elle crée par la suite une cession légale des droits patrimoniaux au profit de l’employeur.

Dans le droit OAPI de la création salariée, le droit d’auteur naît sur la tête de l’auteur. Il s’agit là d’une prépondérance accordée à l’auteur de l’œuvre littéraire et artistique dans la titularité des droits. Le contrat de travail ne saurait emporter, par le seul fait que l’auteur salarié est sous l’autorité hiérarchique de son employeur, la cession ab initio de l’œuvre à l’employeur. Dès lors, l’œuvre relève de l’auteur et y demeure imbriquée à sa personne, même si elle a été conçue dans l’entreprise et avec les moyens de l’entreprise[32]. Ce principe de la naissance du droit d’auteur sur la tête du créateur de l’œuvre confère naturellement à ce dernier un monopole d’exploitation[33]. Toutefois, le législateur OAPI a procédé à la fragmentation de ce monopole dans le cadre de la création littéraire et artistique réalisée par un salarié. Bien qu’il soit expressément dit que les droits patrimoniaux et moraux appartiennent à titre initial à l’auteur salarié, il est précisé par la suite que ces droits patrimoniaux sont présumés transférés à l’employeur dans la mesure justifiée par ses activités habituelles au moment de la création de l’œuvre. On peut en conclure que les droits qui appartiennent exactement à l’auteur salarié sont limités aux droits moraux[34], les droits patrimoniaux[35] étant automatiquement cédés par un mécanisme légal à l’employeur.

Il faut noter qu’il ne s’agit pas de toutes les créations littéraires ou artistiques réalisées par les salariés qui verront leurs attributs patrimoniaux transférés automatiquement à l’employeur. Il existe une condition à ce transfert automatique : l’œuvre du salarié doit rentrer dans les activités habituelles de l’employeur au moment de la création. L’exploitation des attributs patrimoniaux de l’œuvre doit par conséquent être justifiée par les activités usuelles de l’employeur au moment où l’auteur crée l’œuvre. Les droits patrimoniaux ne seront donc pas cédés à l’employeur pour une exploitation étrangère à ses activités habituelles. Si cette condition semble définir le périmètre de la cession automatique des droits patrimoniaux sur l’œuvre salariée à l’employeur, elle ne résout cependant pas les difficultés qui pourraient naître autour de l’appréciation de l’expression « activités habituelles de l’employeur ». Comment établir clairement la frontière entre la création salariée et les activités habituelles de l’employeur ? S’il est par exemple aisé de reconnaître que les droits patrimoniaux sur une œuvre réalisée par un salarié, dont la mission à lui confier par son contrat de travail est de réaliser de telles œuvres, appartiennent à son employeur, la question de la titularité de ces droits patrimoniaux peut s’avérer plus complexe lorsque l’auteur n’est pas expressément investi d’une mission de création littéraire ou artistique[36].

Il paraît en effet difficile d’appréhender, par une seule et unique règle, des créations aussi diverses que celles qui relèvent des arts purs et qui côtoient la multitude des créations salariées dans le domaine des arts appliqués[37]. Le législateur OAPI semble n’avoir pas suffisamment pris en compte la diversité et la complexité de la création salariée dans le domaine littéraire et artistique[38]. Les particularités de la création salariée dans le domaine du journalisme et des logiciels, qui font l’objet des régimes spécifiques en droit français[39], en sont des exemples.

Le morcellement des attributs du droit d’auteur que l’ABR opère entre l’employeur et le salarié a pour but de préserver une éthique dans la titularité des créations salariées en matière littéraire et artistique. On en conclut que dans le cadre des créations littéraires et artistiques réalisées par les salariés, la logique personnaliste du droit d’auteur se soumet à la logique travailliste du droit social[40] dans la mesure où la règle du monopole de l’auteur est, en pareille hypothèse, partiellement contournée et fragilisée[41]. Ce qui invite à s’intéresser à l’exercice conjoint des droits sur l’œuvre salariée par l’employeur et l’auteur salarié.

2- L’exercice conjoint des droits sur l’œuvre par l’employeur et l’auteur salarié

L’exercice conjoint des droits sur l’œuvre salariée par l’employeur et l’auteur salarié peut être source de conflits et appelle des considérations éthiques en raison de la difficulté à concilier le pragmatisme économique qui voudrait que l’employeur puisse exploiter, en toute sécurité, la création de l’auteur salarié, avec la protection tant économique qu’extrapatrimoniale de ce dernier[42]. Le droit moral de l’auteur étant incessible, inaliénable et imprescriptible, il constitue pour l’employeur une barrière sérieuse à l’exploitation de l’œuvre salariée. Or, dans le cadre d’une relation salariée par exemple, le droit moral est, en tous points, opposé au pouvoir de gestion de l’employeur. Et pour cause, l’auteur salarié disposant du droit de divulgation, le salarié garde à tout moment la faculté de choisir le moment de la diffusion de l’œuvre ainsi créée. Dans la même lignée, le droit de retrait et de repentir permet au salarié de mettre fin à l’exploitation de son œuvre ainsi divulguée. Enfin, l’auteur salarié a droit au respect de l’œuvre et ce droit peut se révéler très contraignant pour l’employeur, l’œuvre ne devant subir aucune détérioration, modification, adaptation ou déformation sans l’autorisation du titulaire des droits. L’exercice des droits moraux par l’auteur salarié peut se présenter dès lors comme une véritable épée de Damoclès pour la jouissance des droits de l’employeur, qui bénéficie d’une cession légale et automatique des droits patrimoniaux sur ladite œuvre[43]. Le partage de prérogatives qu’a voulu opérer la loi peut se trouver ainsi biaisé par la puissance du droit moral de l’auteur ; ce qui pourrait entraîner des conflits interminables.

Le droit moral étant par essence personnaliste et inextricablement lié à la création, c’est-à-dire à une personne physique, il apparaissait illogique de l’octroyer à l’employeur qui, non seulement ne fait pas œuvre de création, mais surtout est généralement une personne morale. Le législateur de l’OAPI est alors resté fidèle aux principes directeurs du droit d’auteur d’inspiration Romano-germanique en reconnaissant la place prépondérante de l’auteur sur ses œuvres. Cette philosophie est en opposition totale avec celle du « works made for hire » que connaît par exemple le droit étasunien et qui prévoit que l’employeur, personne physique ou morale, est réputé titulaire ab initio du copyright sur les œuvres réalisées par ses employés dans l’exercice de leurs fonctions[44]. Cette option choisie par le système du copyright étasunien[45]se justifierait par les raisons d’efficacité économique et de protection des entreprises. Le principe de la titularité initiale des auteurs sur les œuvres salariées est aujourd’hui vivement contesté sur le terrain de l’efficacité économique. La tradition personnaliste du droit d’auteur est, en effet, considérée comme un frein au développement des entreprises, celles-ci pouvant voir, à tout moment, leur projet de valorisation de créations contrarié par les auteurs[46]. Toutefois, il ne faudrait pas exagérer la crainte envers le droit moral de l’auteur[47] car, comme tout droit, son exercice ne devrait pas être abusif. La finalité du droit moral étant de sauvegarder le lien intime qui unit l’auteur à son œuvre et par conséquent de préserver le reflet de sa personnalité à travers son œuvre, il serait anormal qu’il soit utilisé dans un but autre susceptible de causer un abus[48]. La Cour de cassation française a admis à ce sujet que le droit moral de l’auteur ne devait pas être exercé dans un « but vexatoire » sous peine de dégénérer en abus[49]. La théorie de l’abus de droit[50] pourrait alors permettre de tempérer la puissance de l’auteur salarié dans l’exercice de son droit moral.

Le législateur de l’OAPI, dans la recherche constante d’un équilibre entre employeur et auteur salarié, a choisi le juste milieu entre le système français de l’attribution totale du droit d’auteur au salarié et le système du copyright qui commande plutôt une cession complète de ce droit à l’employeur, comme c’est le cas dans le domaine des créations industrielles.

B- La rigueur du lien de subordination sur la titularité des créations industrielles des salariés

Plusieurs créations industrielles pouvant être réalisées en exécution d’un lien de subordination[51], le législateur OAPI a défini pour ces dernières un régime quasi commun qui laisse transparaître une primauté accordée à l’employeur dans la titularité des droits sur de telles créations industrielles réalisées par les salariés (1). Pour encadrer cette primauté de l’employeur dans un souci de préservation de l’éthique dans les relations entre ce dernier et le salarié, le législateur a pris le soin de poser les jalons d’un statut du créateur industriel salarié (2).

1- La primauté accordée à l’employeur dans la titularité des créations industrielles salariées

La primauté que la loi reconnaît à l’employeur dans la titularité des droits sur les créations industrielles faites par les salariés est une conséquence logique du lien de subordination juridique et économique qui caractérise le contrat de travail, et qui induit que l’employeur puisse profiter de son investissement en jouissant des avantages découlant de pareilles créations. Il est tout de même bon de noter que bien que l’idée a priori soit d’accorder à l’employeur les droits sur les réalisations industrielles des salariés, tel n’est pas toujours le cas. En effet, il existe plusieurs modalités de créations industrielles de salariés qu’on classe généralement en créations industrielles de mission et hors mission.

Pour la première catégorie dite créations industrielles de mission, le législateur OAPI en précise la nature en rappelant que toutes les créations industrielles (invention, un modèle d’utilité, un dessin ou modèle industriel, un schéma de configuration ou une variété végétale) « faites par le salarié dans l’exécution soit d’un contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, soit d’études et de recherches qui lui sont explicitement confiées, appartiennent à l’employeur » [52]. On en déduit que les créations industrielles dites de mission sont celles réalisées par le salarié dans le cadre de son contrat de travail et des missions qui lui sont confiées. En pratique, la majorité des créations industrielles sont des réalisations de chercheurs salariés d’entreprise, de collectivités publiques ou de personnes morales de droit public. Ce fait est une réalité socio-économique qu’on ne saurait ignorer car, de plus en plus, les grands groupes industriels, l’État n’y étant pas exclu, investissent dans des laboratoires de recherche. Et comme la technologie est évolutive, les réalisations industrielles exigent au quotidien la mise en œuvre des moyens de plus en plus considérables et coûteux[53]. C’est ainsi que les inventions de mission intègrent parfaitement cette réalité socio-économique en établissant une sorte de service d’invention entre les inventeurs et leurs employeurs.  La création industrielle de mission appartient obligatoirement à l’employeur qui décide librement s’il souhaite la protéger, en déposant à l’Organisation une demande d’enregistrement en son nom, ou la garder secrète.

En ce qui concerne la seconde catégorie relative aux créations industrielles dites hors mission, il faut noter qu’en principe toutes les réalisations industrielles faites par le salarié en marge de l’exécution de son contrat de travail sont dites hors mission. Toutefois, il faudrait encore distinguer selon que ces créations industrielles hors mission sont attribuables à l’employeur ou non. Les créations industrielles hors mission attribuables sont celles qui, bien qu’étrangères aux missions confiées au salarié par son contrat de travail, ont été réalisées à l’aide des moyens et données appartenant à l’entreprise et donc à l’employeur. Le législateur OAPI précise à ce sujet que « lorsqu’un salarié n’est pas tenu par son contrat de travail d’exercer une activité inventive, mais invente en utilisant les techniques ou les moyens spécifiques à l’entreprise, ou les données procurées par elle, le droit au brevet appartient au salarié. Cependant, l’employeur a le droit de se faire attribuer la propriété ou la jouissance de tout ou partie des droits attachés au [titre de propriété industrielle] protégeant [la création industrielle de salarié]»[54]. Cette disposition, qui revient dans la quasi-totalité des annexes relatives aux créations industrielles[55] (à l’exception des schémas de configuration de circuits intégrés[56]), donne à comprendre clairement qu’il ne s’agit point dans cette hypothèse d’une attribution légale à l’employeur comme c’est le cas pour les créations industrielles de mission, mais d’une attribution volontaire et sollicitée par l’employeur au terme d’une procédure spécialement fixée à cet effet. L’employeur aura alors la faculté d’imposer au salarié le transfert de tout ou partie de ses droits.

Toutes les autres créations industrielles qui ne rentrent pas dans les hypothèses ci-dessus énumérées sont dites hors mission et appartiennent au salarié. Encore appelées créations industrielles hors mission non attribuables, elles sont définies par défaut comme n’appartenant pas aux catégories précédentes : le salarié a conçu une création industrielle hors de ses missions ou sans utiliser les données et moyens mis à sa disposition par son emploi. Dans cette situation, les relations entre les parties sont assimilables à celles de personnes sans liens entre elles[57].

 2- Les jalons d’un statut du créateur industriel salarié garant des valeurs éthiques

Le souci de préserver l’éthique dans la titularité des créations industrielles des salariés, en conciliant au mieux les intérêts économiques des employeurs avec ceux des salariés créateurs industriels, a conduit le législateur à poser les jalons d’un statut de ces salariés. Ce statut est marqué par la clarification des obligations et des droits des salariés créateurs industriels[58]. En effet, lorsqu’un salarié a réalisé une création industrielle en exécution de son contrat de travail ou avec l’aide des données et moyens de son emploi, il est tenu immédiatement d’en informer son employeur. Cette obligation d’information[59] conduit le salarié non seulement à déclarer la création industrielle quel que soit son objet, mais surtout à donner à l’employeur toutes les informations suffisantes pour que celui-ci soit en mesure de mettre en œuvre son droit à la titularité. Par exemple, en matière de brevet d’invention, le salarié devra, entre autres, procéder à une description claire, précise et complète de l’invention, ce qui faciliterait la tâche à l’employeur lors du dépôt de la demande du brevet. De plus, si l’invention a été réalisée par le salarié en concert avec une autre personne relevant d’un régime différent[60], l’employeur doit en être informé et éclairé de la part respective de chacun des co-inventeurs dans la réalisation de ladite invention. Ces informations permettront, en pareil cas, d’appliquer le régime des inventions salariées à la fraction correspondante à l’activité du co-inventeur salarié. 

À côté de cette obligation positive d’information, le salarié ne devrait rien entreprendre qui puisse nuire ou paralyser la mise en œuvre de la titularité de l’employeur sur la création industrielle salariée. Il s’agit là de la manifestation d’une obligation contractuelle de loyauté qui impose au salarié de collaborer pour la bonne exploitation de la création industrielle en cause. Cette exigence de loyauté, qui en toute logique pèse principalement sur le salarié, concerne également l’employeur. En effet, le législateur OAPI précise que « le salarié et l’employeur doivent se communiquer tous renseignements utiles sur l’invention en cause. Ils doivent s’abstenir de toute divulgation de nature à compromettre en tout ou en partie l’exercice des droits conférés… »[61]. Il s’agit en effet pour les deux parties de collaborer de manière à garantir la bonne exploitation de la création industrielle par le titulaire du droit au titre. C’est la raison pour laquelle le salarié créateur industriel qui dépose en son nom à l’OAPI une demande du titre de propriété, en violation des droits de son employeur, commet une fraude. Le législateur OAPI a prévu un recours en revendication de propriété contre un tel déposant frauduleux. En effet, si un titre de propriété industrielle a été demandé, soit pour une création industrielle soustraite à la personne qui l’a réalisée ou à ses ayants cause, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne lésée peut revendiquer la propriété de la demande[62] ou du titre délivré[63]. Le déposant étant présumé être le propriétaire du titre et au regard de la maxime selon laquelle « foi est due au titre », il appartient au demandeur en revendication de démontrer, soit qu’il s’agit d’une demande soustraite au véritable créateur industriel (inventeur, créateur de design industriel ou de schémas de configuration, obtenteur végétal), soit d’une demande déposée en violation d’une obligation légale ou conventionnelle[64]. Le succès d’une pareille action en revendication n’est point subordonné au fait que le revendiquant ait lui-même déposé le titre[65] ; l’employeur devant tout simplement démontrer que la création industrielle en cause a été réalisée dans le cadre du contrat de travail[66]. Une telle attitude de déloyauté de la part du salarié qui déposerait une demande de titre sur une création industrielle en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, pourrait raisonnablement être qualifiée par l’employeur de faute lourde légitimant un licenciement.

Bien que les créations industrielles faites par le salarié en exécution de son contrat de travail ou à l’aide des données et moyens offerts par son emploi, peuvent appartenir à l’employeur s’il le souhaite, le salarié auteur de ladite création industrielle bénéficie néanmoins des avantages pécuniaires précis. Le législateur de l’OAPI rappelle pour les créations industrielles de mission que « le salarié auteur d’une telle [création industrielle], bénéficie d’une rémunération supplémentaire qui, à défaut d’être déterminée par voie de négociation collective ou individuelle, est fixée par la juridiction nationale compétente »[67]. Il poursuit en précisant pour les créations industrielles hors mission attribuables que « …dans ce dernier cas, le salarié doit en obtenir un juste prix qui, à défaut d’accord entre les parties est fixé par la juridiction nationale compétente. Celle-ci prendra en considération, tous les éléments qui pourront lui être fournis, notamment par l’employeur et par le salarié, pour calculer le juste prix, tant en fonction des apports initiaux de l’un et de l’autre que de l’utilité industrielle et commerciale de l’invention »[68]. On retient alors que le créateur industriel salarié bénéficie soit d’une rémunération supplémentaire (dans le cadre des créations industrielles de mission) soit d’un juste prix (en matière de créations industrielles hors mission attribuables à l’employeur) qui, à défaut d’entente entre les parties ou par voie de négociation collective, est fixée par le tribunal[69].

La question régulièrement posée est celle du délai dont dispose le salarié pour revendiquer le paiement de cette rémunération spéciale. La réponse dépendra bien évidemment des dispositions prévues par les législations nationales relatives au droit du travail. Pour ce qui est du Cameroun, par exemple, la créance relative au salaire se prescrit par trois ans[70]. Cette disposition relative à la prescription de la créance de salaire pose tout de même des difficultés quant à son application à la prescription d’une rémunération spéciale en matière de création industrielle faite par un salarié. En effet, la détermination du point de départ du délai de prescription n’est pas aisée en l’espèce. Confronté à la même difficulté, le droit positif français, par le biais de sa jurisprudence récente, admet notamment dans la décision Polimeri Europa France SA c. Karel Bujadoux[71], que le délai de prescription court à compter de la date à laquelle le salarié a connaissance des éléments ouvrant droit à une rémunération. Encore faut-il que le salarié soit avisé sur le mode de calcul de cette rémunération supplémentaire afin que ses droits ne soient pas bafoués. En l’absence de dispositions précises à ce sujet dans le droit OAPI, l’Accord de Bangui laisse le soin aux parties de fixer de commun accord cette rémunération, et à défaut d’entente, de faire recours au tribunal civil. Les hésitations de la jurisprudence française sur la question[72] invitent à réfléchir afin de combler ce vide législatif dans l’espace OAPI dans le sens de la détermination précise du mode de calcul de la rémunération supplémentaire au titre de la création industrielle salariée. La solution consisterait par exemple à instaurer une technique de rémunération en deux temps constituée d’abord d’une somme forfaitaire, puis d’un complément de rémunération établi au regard du bilan d’exploitation de la création industrielle concernée. Une telle solution s’inscrit d’ailleurs dans la modulation contractuelle que les parties pourraient apporter aux effets du lien de subordination.

II- La préservation de l’éthique à travers la régulation contractuelle de l’influence du lien de subordination sur la titularité des créations intellectuelles des salariés

La volonté du législateur OAPI de sauvegarder les considérations éthiques dans l’attribution des droits sur les réalisations intellectuelles des salariés l’a conduit à consacrer la possibilité de moduler les effets légaux prédéfinis du lien de subordination à travers le mécanisme des aménagements contractuels. En effet, le domaine contractuel charrie en lui-même les valeurs éthiques en raison de ses fondements volontaristes qui permettent aux parties d’ajuster leurs droits et obligations selon leurs besoins. C’est donc sans doute la raison pour laquelle, en admettant la modulation des effets du lien de subordination par les arrangements contractuels, l’ABR procède à la recherche d’une éthique consolidée dans la titularité des créations intellectuelles des salariés (A). Toutefois, pour éviter que l’usage de ce mécanisme contractuel ne soit fourvoyé, le législateur a bien voulu encadrer ces arrangements contractuels en vue de sauvegarder l’éthique recherchée (B).

A- La recherche d’une éthique renforcée dans le contournement des effets du lien de subordination par la volonté des parties

L’idée de la primauté accordée à l’employeur dans le bénéfice des avantages découlant des réalisations intellectuelles des salariés peut être contournée par des arrangements contractuels. En effet, l’ABR le prévoit expressément lorsqu’il rappelle tant pour les œuvres littéraires ou artistiques que pour les créations industrielles faites par les salariés que la dévolution du droit de propriété intellectuelle et des avantages y afférents sont, à défaut de stipulation contractuelle[73], régis selon ses dispositions[74]. Le législateur poursuit en admettant, dans le domaine précis de la propriété industrielle, que l’employeur puisse renoncer au droit au titre au profit du salarié. C’est dire que les effets du lien de subordination peuvent être tantôt modulés par des stipulations contractuelles (1), tantôt neutralisés par la renonciation de l’employeur (2).

1- La modulation des effets du lien de subordination par les stipulations contractuelles plus favorables au salarié

Le souci de la conciliation des intérêts du créateur industriel et ceux de son employeur a conduit le législateur à prévoir une marge de manœuvre dans laquelle ces deux parties peuvent moduler leurs droits en fonction de leurs objectifs et profits spécifiques. La primauté de l’employeur dans l’attribution des droits sur les réalisations industrielles des salariés peut alors être contournée par les parties à travers les stipulations contractuelles qui ne peuvent intervenir que dans un sens plus favorable au salarié[75]. En effet, le régime supplétif prévu par les stipulations contractuelles n’est licite et valable que s’il a essentiellement pour but d’améliorer la protection et la condition du salarié telles que prévues par le régime légal prédéfini par l’ABR.

Ces stipulations peuvent porter tant sur le titre en lui-même que sur les avantages qui en découleraient. En ce qui concerne les stipulations contractuelles relatives au titre, les parties à un contrat de travail peuvent expressément prévoir que les créations intellectuelles qui seront réalisées par le salarié par le fait et/ou à l’occasion de son travail, appartiendront exclusivement au salarié et non pas à l’employeur comme l’indique en principe la loi[76]. Une telle disposition contractuelle doit être suffisamment claire et explicite, car elle conduira à changer le bénéficiaire légal du droit de propriété. Tout se passe, en principe, comme si le contrat de travail entraînait, par sa nature, la primauté de l’employeur dans l’acquisition du droit de propriété intellectuelle ; toute chose qui est logique, l’employé bénéficiant d’une rémunération permanente. Dès lors, pour que la titularité revienne au salarié, il faut qu’une disposition contractuelle l’ait expressément prévue.

Pour ce qui est des stipulations contractuelles relatives aux avantages pécuniaires qui pourraient découler de l’exploitation de la création intellectuelle faite par un salarié, les parties au contrat de travail peuvent aménager une plus grande participation du salarié au bénéfice de ces avantages. Ils pourraient par exemple opter pour une co-exploitation égalitaire de la création intellectuelle concernée. L’employeur pourrait même, bien que cela paraisse surréaliste, consentir à l’attribution de l’ensemble des avantages découlant de ladite création à son salarié. Ce qui s’apparenterait pour l’employeur à une renonciation au bénéfice de la titularité.

2- La neutralisation des effets du lien de subordination par la renonciation de l’employeur

En précisant que « si l’employeur renonce expressément au droit au [titre], le droit appartient au salarié », l’ABR a consacré, pour l’employeur, l’hypothèse de renonciation du droit au titre sur les créations industrielles faites par les salariées. Bien que cette renonciation par l’employeur ne soit clairement consacrée que dans le domaine de la propriété industrielle (précisément dans les annexes relatives aux créations industrielles[77]), elle n’est pas inimaginable ou interdite en matière de propriété littéraire et artistique. En effet, la renonciation est généralement appréhendée comme étant un acte unilatéral[78], mieux encore, un acte juridique unilatéral par lequel une personne abandonne volontairement une prérogative qui lui appartient[79]. C’est-à-dire qu’en ce qui concerne les créations intellectuelles (industrielles, littéraires ou artistiques) faites par les salariés, la renonciation a pour effet direct de faire revenir le droit au titre et tous ses avantages au créateur salarié ou à ses ayants cause. Le législateur OAPI, sans donner d’autres précisions quant aux modalités de cette renonciation, rappelle simplement que cette dernière doit être expresse. La question peut donc se poser de savoir comment et quand l’employeur doit-il ou est-il autorisé à renoncer à son droit ?

De manière générale, une personne ne peut valablement abandonner un droit que dans le cas où elle est libre d’en disposer, et même dans le cas où elle est juridiquement capable, elle ne peut y consentir que si la loi ne lui interdit pas un tel abandon. Pour ce qui est de la forme de l’acte contenant la renonciation, par principe, la Cour de cassation française[80] rappelle qu’elle doit être constatée dans la même forme exigée pour son acceptation. Ainsi, la renonciation à une donation doit revêtir la même forme authentique que l’acceptation qu’elle entend rétracter. Pour ce qui est de la renonciation à un droit de propriété intellectuelle par l’employeur, le législateur rappelle simplement que celle-ci doit être expresse, c’est-à-dire certainement par tous moyens précis et non équivoque laissant trace écrite. Dès lors, la question relative au moment de cette renonciation paraît intéressante. À partir de quel instant l’employeur est-il autorisé à renoncer à son droit ? La loi ne donnant aucun éclaircissement à ce sujet, on pourrait estimer qu’un certain encadrement du droit à renonciation impose qu’on ne puisse raisonnablement renoncer qu’à un droit né et actuel. Ainsi, on ne peut renoncer à ses droits dans une succession qui n’est pas encore ouverte[81] ou renoncer à des dommages-intérêts si le dommage ne s’est pas encore produit. Dans cette logique, la renonciation par l’employeur à un droit de propriété intellectuelle, dans l’hypothèse d’une réalisation de salarié, ne serait possible qu’à la condition de la preuve que ce droit est né et actuel. Concrètement, il s’agira de conclure que l’employeur peut renoncer à son droit à tout moment postérieurement à la réalisation de la création intellectuelle : soit immédiatement après avoir été informé par l’employé de la réalisation de ladite création intellectuelle, soit (en ce qui concerne spécialement les titres de propriété industrielle) après le dépôt par ce dernier de la demande de titre, et même après sa délivrance[82]. Dans ce dernier cas, le titre sera rétrocédé au créateur salarié sans rétroactivité[83]. Dans tous les cas, ces arrangements contractuels sont encadrés dans un souci d’anticipation sur les abus et par conséquent de préservation éthique.

B- La sauvegarde de l’éthique par l’encadrement des arrangements contractuels relatifs à la titularité des créations intellectuelles des salariés

Le législateur OAPI encadre les arrangements contractuels relatifs au droit sur les créations salariées en exigeant, sous peine de nullité, un écrit (1). L’obligation générale d’exécution contractuelle de bonne foi vient compléter cet écrit en imposant un ensemble de comportements éthiques aux parties d’une convention portant sur une création intellectuelle de salarié (2).

1- L’exigence d’un écrit ad validitatem

Toutes les dispositions de l’ABR sur les créations dans le domaine industriel rappellent que « tout accord entre le salarié et son employeur ayant pour objet une [création industrielle] de salarié doit, à peine de nullité, être constaté par écrit »[84]. Cette précision du formalisme obligatoire de l’écrit pour la validité des contrats sur les créations industrielles des salariés s’inscrit dans un principe général posé par le législateur OAPI qui exige un écrit pour la validité de tous les contrats portant sur les droits de propriété intellectuelle. Qu’il s’agisse donc des attributs patrimoniaux du droit d’auteur ou de tout titre de propriété industrielle cessible, l’écrit apparaît comme une condition substantielle de validité dont l’inobservation est sanctionnée par la nullité. L’Annexe VII de l’ABR relative à la propriété littéraire et artistique énonce à cet effet que « sous peine de nullité, les contrats de cession de droits patrimoniaux ou de licence pour accomplir des actes visés par les droits patrimoniaux sont conclus par écrit, y compris les supports électroniques conformément à la législation nationale en vigueur »[85]. Toutes les autres Annexes relatives aux droits de propriété industrielle reprennent cette exigence d’écrit en ces termes : « les actes comportant, soit transmission de propriété, soit concession de droit d’exploitation ou de cession de ce droit, soit gage ou mainlevée de gage (…), doivent sous peine de nullité, être constatés par écrit »[86].

L’écrit apparaît alors en droit OAPI comme étant une condition commune de validité des contrats sur tout droit de propriété intellectuelle, fût-il réalisé dans le cadre d’un contrat de travail. Cette formalité d’écrit, qu’on peut qualifier de forme solennelle[87], fait des contrats sur les droits de propriété intellectuelle, des actes juridiques solennels[88] dont la finalité première est d’éviter les abus et les conflits que son absence pourrait causer[89].

L’ABR n’ayant clairement consacré la possibilité d’usage des supports électroniques qu’en matière de propriété littéraire et artistique pour les contrats de cession de droits patrimoniaux ou de licence pour accomplir des actes visés par les droits patrimoniaux[90], l’on pourrait se demander si cette modalité de l’écrit électronique est admise pour tous les autres droits de propriété intellectuelle.

L’introduction des TIC en matière contractuelle et l’émergence fulgurante du phénomène de la dématérialisation conduisent de nos jours à établir une équivalence entre l’écrit papier et l’écrit électronique. C’est dans ce sillage que le droit communautaire des affaires de l’OHADA[91] consacre l’égalité de valeur entre les documents électroniques[92]  et les documents papiers[93]. Cette égalité permet aux documents électroniques de se substituer parfaitement aux documents sur support papier[94]. La reconnaissance de l’équivalence fonctionnelle suppose que les conditions de sécurité soient remplies, notamment à travers la signature électronique[95] et le certificat électronique[96]. Cette équivalence n’est alors établie et maintenue que selon un procédé technique fiable garantissant à tout moment l’origine du document sous forme électronique et son intégrité au cours des traitements et des transmissions électroniques[97]. On peut en conclure que toutes les conventions sur les créations intellectuelles des salariés peuvent être faites par les moyens électroniques du moment où les exigences y relatives sont respectées.

2- L’obligation d’exécution contractuelle de bonne foi

La protection de la partie faible est devenue une composante du droit des contrats et le principe de l’exécution de bonne foi des conventions en est un très bon exemple. Les parties à un arrangement contractuel portant sur une création intellectuelle de salarié devraient se soumettre à cette exigence d’exécution de bonne foi que véhicule l’article 1134 du Code civil de 1804 applicable au Cameroun[98]. Bien que la doctrine soit très partagée sur la notion de bonne foi et l’importance à lui donner, nous partageons l’analyse de Monsieur Mazeaud qui constate que le contrat est « bien souvent le produit d’un rapport de force, la source d’excès et d’abus, et nombreux sont les contrats injustes, parce que manifestement déséquilibrés, qui ont force obligatoire entre ceux qui les ont conclu en toute inégalité et sans autre liberté que celle déployée par le cocontractant en situation de domination lors de la conception de l’accord »[99]. Cette description pourrait correspondre, dans la majeure partie des cas, à la réalité concernant le droit des contrats de propriété intellectuelle, précisément les contrats entre employeurs et créateurs salariés. La bonne foi dans ces contrats peut s’analyser en deux grands principes : le principe de loyauté et le principe de coopération.

Le devoir de loyauté concerne autant le créateur salarié que l’employeur. Le salarié, qui est la personne à l’origine de la création intellectuelle, doit « s’abstenir de déloyauté, de manœuvres qui tendraient à rendre l’exécution du contrat impossible ou plus difficile »[100] . On considère, par ailleurs, que le devoir de loyauté impose au salarié une exécution fidèle de son engagement. Ce devoir pèse également sur l’employeur. Ce devoir de loyauté est mis en lumière par monsieur MAZEAUD sous l’appellation de « contrat sociable ». Ce qui englobe dans un premier temps le devoir de transparence qui correspond lui-même à l’obligation précontractuelle d’information. Par ailleurs, « la loyauté qui doit régner dans la sphère contractuelle oblige ensuite à une certaine décence »[101]. Cette notion de décence englobe, d’une part, l’exigence d’un équilibre contractuel minimum, ce qui conduit à lutter contre les clauses abusives, et, d’autre part, il faut pour satisfaire à l’exigence de décence, envisager avec une certaine mesure les pouvoirs que le « maître du contrat » s’est octroyés. De ce fait, l’employeur doit user de ses prérogatives patronales conformément à l’exigence de bonne foi[102].

Enfin, le contrat doit répondre à une notion de cohérence qui implique « que chaque partenaire fasse preuve d’une certaine constance dans son comportement, notamment lorsque son attitude a fait naître une confiance légitime dans l’esprit de son interlocuteur »[103]. Cette exigence est également indispensable afin de tempérer la liberté des contractants, particulièrement celle de l’employeur dont la situation de domination sur le salarié autorise à élaborer unilatéralement le lien contractuel, dans la détermination du contenu du contrat.

Au-delà de tout ce que la bonne foi doit empêcher comme comportement afin de maintenir des bonnes relations contractuelles entre employeur et salarié au sujet d’une création intellectuelle réalisée par ce dernier, la notion de bonne foi va plus loin et englobe également un devoir de coopération imposé auxdites parties. Ce volet est considéré par M. MAZEAUD comme le « contrat solidaire »[104]. Ce devoir de coopération est plus ou moins marqué selon la nature du contrat ; il peut varier selon que les arrangements contractuels entre employeur et salarié ont pour but d’organiser une co-exploitation de la création salariée, une cession de droit de l’un à l’autre, ou encore une renonciation de l’employeur aux droits que la loi lui reconnaît sur ladite création. Cette branche de la notion de bonne foi, impliquerait une sorte de « devoir d’assistance à autrui »[105]. On peut alors considérer que l’esprit de solidarité contractuelle oblige chaque contractant à faire preuve d’un esprit de coopération tel que son cocontractant puisse, d’une part, profiter de la prestation exécutée à son profit, d’autre part, exécuter sans difficulté ses propres obligations. On considère même parfois que le désir de coopération implique que le cocontractant privilégie les intérêts de l’autre par rapport aux siens, c’est-à-dire un devoir d’ingérence dans les affaires d’autrui. C’est en raison de ce devoir d’ingérence éthique que l’employeur et le créateur salarié devraient régulièrement agir en privilégiant à chaque fois leurs intérêts réciproques qui sont généralement opposés.

Conclusion 

Le potentiel financier que charrient les droits de propriété intellectuelle conduit logiquement à une ruée vers la réservation de ces droits. Une telle course pour l’acquisition des droits exclusifs en matière de propriété intellectuelle se déroule parfois en violation des règles et usages éthiques. Ces considérations éthiques sont amplifiées dans le cadre de la titularité des droits sur les créations intellectuelles réalisées par les salariées, en raison des intérêts traditionnellement opposés de l’employeur et du salarié. Pour s’assurer de garantir le respect des considérations éthiques dans l’acquisition des droits sur de pareilles créations, le législateur OAPI a mis en place un certain nombre de mécanismes dont le but est de réguler l’influence du lien de subordination dans un souci de conciliation optimale des intérêts de ces partenaires aux objectifs antagonistes. Cette régulation qui peut être légale ou conventionnelle permet d’imposer à ces derniers un ensemble d’obligations juridiques, comportementales et morales.

 

 

[1] J. BENDA, La trahison des clercs, éd. Nouv. 1946, p. 118. Cité  par G. RIPERT, Les forces créatrices du droit, LGDJ, Paris, 1955, p. 191.

[2] Le droit de propriété est défini par le Code civil comme  « le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par la loi ou les règlements » Il est protégé au plan international  par la Déclaration universelle des droits de l’homme en son article 17 et la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 en son  article XVII également. Cette protection s’étend aussi au plan communautaire comme on peut le constater notamment dans la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), protocole no 1 en son article 1er, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples en son article 14. On peut observer la protection de la propriété au plan national à travers la constitutionnalisation de ces textes internationaux et régionaux. Le cinquième et le quatorzième amendement de la Constitution des États-Unis, par exemple, protègent explicitement la propriété privée. En 1970, le Conseil constitutionnel français reconnaît la valeur constitutionnelle de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) du 26 août 1789 en l’intégrant dans le bloc de constitutionnalité du préambule de la Constitution du 4 octobre 1958. Au Cameroun également, le droit de propriété est consacré par le préambule de la constitution et par le Code civil en son article 544.

[3] P. Y.  GAUTIER, « Rapport de synthèse », in Le droit et l’immatériel, Archives de philosophie du droit, t. 43, éd. Sirey, 1999, p. 233.

[4] M. LEVY et  J.-P. JOUYET « L’immatériel, la croissance de demain », Le Figaro du 9 décembre 2006.

[5] P. TABATONI, « L’incorporel comme ressource économique, Propos introductifs », in Le droit et l’immatériel, Archives de philosophie du droit, t. 43, éd. Sirey,1999, p. 149.

[6] J. RIFKIN, L’âge de l’accès : la nouvelle culture du capitalisme, éd. La Découverte, Essais, 2000, p. 5 : « Concepts, idées et images – et non les choses/biens – sont lescomposantes incontestables de la valeur dans la nouvelle économie. La richesse ne naît plus du capital physique mais plutôt de l’imagination et de la créativité humaine » ; V.également A. GORZ, L’immatériel, éd. Galilée, 2003, p. 13 : « la valeur puise actuellement sa source dans l’intelligence et l’imagination ».

[7] L’immatériel est aujourd’hui le facteur clé de succès des économies développées. «…Tous les secteurs industriels, des semi-conducteurs au textile, des logiciels aux télécommunications, font désormais de l’immatériel la clé de leur avenir. La valeur des entreprises repose de plus en plus sur des éléments immatériels, parfois quantifiables, parfois moins, par exemple la valeur de leur portefeuille de brevets et de leurs marques ou la capacité créative de leurs équipes ». Extrait du rapport LEVY & JOUYET (2006), intitulé L’économie de l’immatériel : la croissance de demain, précité. V. également N. BINCTIN, Le capital intellectuel, Paris, Litec, 2007, 764 p.

[8] N. BINCTIN, Droit de la propriété intellectuelle. Droit d’auteur, brevet, droits voisins, marques, dessins et modèles, Paris, LGDJ-Lextenso, 3ème éd., 2014, p. 23 ss. : « un bien intellectuel est une chose issue de l’imagination humaine dans l’exercice d’une activité créative susceptible d’appropriation indépendamment de tout support ».

[9] Chiffres disponibles sur :http://www.journaldunet.com/0407/040727classementmarques.shtml).

[10] V. G. SAND et LELIA, cités en épigraphe par V. PINTO HANIA, op. cit.,: « Depuis que  j’existe, je rêve les grandeurs du renoncement aux faux biens de  ce  monde  et la  conquête  des  biens immatériels ».

[11] L’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle est créée par l’Accord de Bangui du 2 Mars 1977 entré en vigueur le 8 Février 1982. L’Accord de Bangui est venu suppléer à l’Accord de Libreville du 13 septembre 1962 qui avait institué l’OAMPI (Office Africain et Malgache de la Propriété Industrielle) dont douze Etats étaient membres à savoir : le Cameroun, le Congo, la Côte d’Ivoire, le Dahomey (actuel Bénin), le Gabon, la Haute-Volta (devenue Burkina Faso), Madagascar, la Mauritanie, le Niger, la République Centrafricaine, le Sénégal et le Tchad. L’espace actuel de l’OAPI compte dix-sept Etats membres. Aux Etats signataires de l’Accord de Libreville (excepté Madagascar qui s’était retiré) se sont successivement ajoutés le Togo, le Mali, la Guinée, la Guinée Bissau et la Guinée Equatoriale, les Comores.

La mise en œuvre de cet Accord de Bangui avait mis à jour un certain nombre de difficultés et ses dispositions se sont avérées incompatibles avec l’Accord sur les Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) auquel les Etats membres de l’OAPI ont adhéré, rendant du coup nécessaire une nouvelle révision de l’Accord de Bangui. Cette révision a été menée sur la période de 1994 à 1997 et le nouvel accord révisé a été signé à Bangui le 24 Février 1999 et est entré en vigueur le 28 Février 2002.

De plus en plus animée du désir de promouvoir la contribution effective de la propriété intellectuelle au développement de ses Etats membres, l’OAPI a engagé une nouvelle révision de l’ABR qui a été actée le 14 décembre 2015 à BAMAKO au Mali. C’est cette dernière révision de l’Accord de Bangui ci-dessous abrégé “ABR” qui régit la propriété intellectuelle dans l’espace OAPI. L’ABR est accompagné de dix (10) annexes à savoir: l’Annexe I sur les brevets d’invention, l’Annexe II sur les modèles d’utilité, l’Annexe III relative aux marques de produit ou de service, l’Annexe IV sur les dessins et modèles industriels, l’Annexe V sur les noms commerciaux, l’Annexe VI sur les indications géographiques, l’Annexe VII sur la propriété littéraire et artistique, l’Annexe VIII sur la protection contre la concurrence déloyale,  l’Annexe IX relative aux schémas de configuration, l’Annexe X sur les obtentions végétales.

[12] Cf. J. TEGUEZEM, « Éthique et droit », in Annales de la Faculté des sciences juridiques et politiques de l’Université de Dschang, T 12 ; 2008, p.177 ; Ph. AONZO, « Point de vue sur l’éthique de l’entreprise », Petites Affiches, 14 sept. 2001, n° 184, p. 4 ; J.-F. BARBIERI, « Morale et droit des sociétés », Petites Affiches, 7 juin 1995, n° 68.

[13] La morale renvoie à une norme abstraite contrairement à l’éthique qui se rapproche des comportements et des attitudes (Cf. L. COTTE, « Droit médical, éthique médicale et déontologie » (1989) journal de médecine légale 131; cité par C. LAVALLÉE, « À la frontière de l’éthique et du droit », 24 R.D.U.S. 1993, p. 20). La morale propose un système de valeurs fondamentales et impératives qui sont autant de points d’ancrage nécessaires à l’humanisation de l’homme dans l’univers (Cf. Ph. LE TOURNEAU, « L’éthique des contrats internationaux », in Éthique des affaires : de l’éthique de l’entrepreneur au droit des affaires, CREEADP, actes du colloque d’Aix-en-Provence, 4 et 5 juillet 1996, éd. Coll. Éthique et Déontologie, 1997, p. 249). Or l’éthique serait le résultat de l’évolution de la morale pour répondre à de nouveaux impératifs sociaux. Du moins elle vise à prendre en compte les aspects sociologiques, économiques, philosophiques et moraux d’un problème afin de justifier le plus rationnellement possible la solution privilégiée par la démarche éthique. L’éthique moderne ne cherche qu’à justifier rationnellement la légitimité de nos choix d’actions.

[14] A. SALMON, Éthique et ordre économique : Une entreprise de séduction, CNRS Éditions, Paris, 2002, p. 7.

[15] A. SUNKAM KAMDEM (dir.), Considérations éthiques dans le droit des affaires de l’OHADA, éd. Veritas, Douala, 322 p. ; J.-Y. NAUDET, Éthique des affaires : de l’éthique de l’entrepreneur au droit des affaires, CREEADP, actes du colloque d’Aix-en-Provence, 4 et 5 juillet 1996, éd. Coll. Éthique et Déontologie, 1997, 367 p.

[16] Cf. J. MESTRE, « Préface » à La transparence en droit privé des contrats, approche critique de l’exigence, PUAM, 1998, p.7. Dans le même sens, J. CARBONNIER, « Propos introductifs », in La transparence, Actes du colloque de DEAUVILLE organisé les 19-20 juin 1993 par l’Association Droit et Commerce, RJC, 11/1993, numéro spécial, p. 9 ; E. L. NGUIFFEU TAJOUO, Les intermédiaires de commerce en droit de l’Ohada, Essai d’une théorie générale de la représentation commerciale, thèse en cotutelle, Universités de Paris 1 et de Dschang, 22 oct. 2015, p. 144 et s, n° 261 et s.

[17] A. SALMON, Éthique et ordre économique : une entreprise de séduction, CNRS Éditions, Paris, 2002, p. 21 ; J. MESTRE, « Préface » à La transparence en droit privé des contrats, op. cit.,  p.7.

[18] Droits des artistes musiciens, des auteurs de romans, des auteurs d’œuvres cinématographiques, etc.

[19] Droits des artistes interprètes et exécutants, des producteurs de phonogrammes ou de vidéogrammes, des entreprises de radiodiffusion, etc.

[20] Les droits voisins portent par exemple sur les interprétations et/ou exécutions, les phonogrammes et vidéogrammes, les programmes ou émissions.

[21] Selon l’article 1 al. 1 de l’Annexe I de l’ABR relative au brevet d’invention, une invention s’entend d’une idée qui permet dans la pratique la solution d’un problème particulier dans le domaine de la technique.

[22] Selon l’article 1 al. 1 de l’annexe IX relative aux schémas de configuration, un « Circuit intégré » est un produit, sous sa forme finale ou sous une forme intermédiaire, dans lequel les éléments, dont l’un au moins est un élément actif, et tout ou partie des interconnexions font partie intégrante du corps ou de la surface d’une pièce de matériau et qui est destiné à accomplir une fonction électronique. Le « Schéma de configuration » qui est synonyme de « topographie » est la disposition tridimensionnelle, quelle que soit son expression des éléments, dont l’un au moins est un élément actif, et de tout ou partie des interconnexions d’un circuit intégré, ou une telle disposition tridimensionnelle préparée pour un circuit intégré destiné à être fabriqué.

[23] Il s’agit au regard de l’Annexe X de l’ABR relative aux obtentions végétales de nouvelles « Variétés végétales » entendues comme l’ensemble végétal d’un taxon botanique du rang le plus bas connu.

[24] Au regard de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, est considéré comme dessin, tout assemblage de lignes ou de couleurs, et comme modèle toute forme plastique associée ou non, à des lignes ou à des couleurs, pourvu que cet assemblage ou forme donne une apparence spéciale à un produit industriel ou artisanal et puisse servir de type pour la fabrication d’un produit industriel ou artisanal.

[25] Les règles de la concurrence s’imposent à toutes les entreprises dans un souci d’ordre public économique. Il y a déjà longtemps que l’on a admis que des limites doivent être apportées au principe de liberté du commerce et de l’industrie en général, et celui de la libre concurrence en particulier car, un certain nombre de pratiques tendent à en fausser le jeu. C’est cela qui constitue la réglementation de la concurrence dans sa variante dite de la concurrence déloyale.

[26] Ce dernier doit pouvoir reconnaître l’origine industrielle, commerciale ou géographique des produits ou services, afin de choisir librement ceux qui remplissent ses attentes.

[27] Au regard de l’article 2 al.1 de l’Annexe III de l’ABR relative aux marques de produits et de service, est considéré comme marque de produit ou de service, tout signe visible ou sonore utilisé ou que l’on se propose d’utiliser et qui est propre à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.

[28] Selon l’article 1 de l’Annexe V de l’ABR relative aux noms commerciaux, constitue un nom commercial, la dénomination sous laquelle est connu et exploité un établissement commercial, industriel, artisanal, agricole ou exerçant une autre activité économique.

[29] Selon l’article 1 al. a) de l’Annexe VI de l’ABR relative aux indications géographiques, une « Indication géographique » renvoie à des indications qui servent à identifier un produit comme étant originaire d’un lieu, d’une région ou d’un pays, dans les cas où une qualité, réputation ou autre caractéristique déterminée du produit peut être attribuée essentiellement à cette origine géographique.

[30] L’économie dite de la connaissance correspond en termes financiers, à la prédominance des actifs intellectuels ou intangibles, sur des actifs matériels. C’est ainsi, par exemple, que 75% de la capitalisation boursière des 500 premiers groupes cotés aux États Unis est attribuée à des actifs immatériels sous forme de brevets, marques et droit d’auteur. Cf. G. FABRE, Propriété intellectuelle, contrefaçon et innovation : les multinationales face à l’économie de la connaissance, Publications des Universités de Rouen et du Havre, 2009, p. 13.

[31] Le droit du travail et le droit de la propriété intellectuelle ne poursuivent pas en principe les mêmes objectifs: tandis que l’un, bien que recherchant un juste équilibre entre employeur et travailleur, poursuit prioritairement l’objectif de protection du travailleur ; l’autre se structure autour de l’établissement de la qualité d’auteur ou d’inventeur.

[32] A titre d’exemple, les traducteurs peuvent être considérés comme auteur des traductions dès lors que celles-ci portent l’empreinte de leur personnalité (Cass. civ. 1ère, 11 février 1970, D. 1970, p. 227). Il en sera de même des graphismes ou des textes destinés à figurer sur les pages web de l’entreprise ou sur celles de ses clients, et qui ont été réalisés par un salarié de l’entreprise.

[33] L’article 3 de l’Annexe VII de l’ABR le dit clairement quand il énonce que : “ l’auteur de toute œuvre originale de l’esprit, littéraire et artistique jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création d’un droit de propriété incorporelle, exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial”.

[34] Les prérogatives du droit moral de l’auteur comprennent le droit de divulgation, le droit de paternité, le droit au respect de l’œuvre et le droit de retrait et de repentir. Par le droit de divulgation, l’auteur décide de publier son œuvre, c’est-à-dire de la communiquer au public. Par le droit de paternité, l’auteur est assuré que son œuvre ne pourra pas être présentée sans la mention du nom de son créateur. Pour le droit au respect, l’auteur pourra empêcher toutes les atteintes que l’œuvre peut subir dès sa révélation au public. Enfin, le droit de retrait et de repentir est la possibilité pour l’auteur de revenir sur son œuvre, de mettre fin à toute publication ou diffusion. Ces attributs du droit moral sont inaliénables, insaisissables, perpétuels et imprescriptibles.

[35] Il s’agit des droits relatifs à l’exploitation de l’œuvre et qui sont de nature pécuniaire ou évaluable en argent.

[36] Par exemple un comptable d’une entreprise de tourisme qui rédige un ouvrage célèbre sur la promotion du tourisme se verra-t-il obliger de céder les droits patrimoniaux sur sa création littéraire à son employeur aux motifs que l’exploitation de ladite création par ce dernier est justifiée par ses activités habituelles ? On pourrait également se demander si la caissière d’une entreprise pharmaceutique, passionnée de l’informatique, qui a développé un logiciel de vente et de suivi de vente de médicaments en ligne verra les droits patrimoniaux sur ce logiciel automatiquement transférés à son employeur au motif que l’exploitation dudit logiciel rentre dans les activités usuelles de son employeur, alors même que le logiciel en question n’a pas été créé pour le compte de cet employeur ?

[37] C. CARON, Droits d’auteur et droits voisins, 6ème éd., LexisNexis, Paris, 2020, p. 189.

[38] En dehors des œuvres créées dans le cadre d’une commande pour la publicité et des œuvres audiovisuelles (Art. 36 et 37 de l’Annexe VII de l’ABR) pour lesquelles ils existent des dispositions particulières.

[39] Ibid, p. 191 à 195.

[40] S. LE CAM, L’auteur professionnel : entre droit d’auteur et droit social, Thèse de doctorat, Université de Nantes, année 2011, p. 225.

[41] Cette position du droit OAPI sur la question est différente de celle adoptée par le droit français qui rappelle que l’existence ou la conclusion d’un contrat de louage d’ouvrage ou de service par l’auteur d’une œuvre de l’esprit n’emporte aucune dérogation à la jouissance du droit d’auteur (Cf. V. Art. L. 111-1 al. 3 du CPI). C’est dire qu’en France, l’auteur salarié est le titulaire originel des attributs tant patrimoniaux qu’extrapatrimoniaux du droit d’auteur sur l’œuvre salariée. Lire à ce sujet, M. VIVANT et  J.-M. BRUGUIERE, Droits d’auteur, 1ere éd., Paris, Dalloz, 2009, no 260, p. 199.

[42] C. CARON, Droits d’auteur et droits voisins, 6ème éd., LexisNexis, Paris, 2020, p. 190.

[43] Il est vrai que l’exercice de ce droit moral par l’auteur salarié ne doit pas être abusif. L’abus du droit moral de l’auteur, source de responsabilité civile de l’auteur pourrait même constituer pour ce dernier une cause de licenciement légitime. La jurisprudence française considère en effet que l’exercice licite du droit d’auteur ne saurait constituer un motif de licenciement, sauf intention de nuire et de manquement à l’obligation de loyauté. Cf. Cass. Soc., 18 janvier 2011, Propriété intellectuelle, 2011, no 40, p. 289, note J.-M. BRUGUIERE.

[44] M. VIVANT et  J.-M. BRUGUIERE, préc.

[45] Il en est de même dans le copyright britannique. V. à ce sujet l’article 101 du copyright Act de 1988 du Royaume-Uni.

[46] Il faut observer toutefois que plusieurs techniques sont généralement sollicitées pour contourner cette difficulté. Parmi elles, celle consistant pour l’employeur à faire usage de la notion de l’œuvre collective afin de se faire attribuer à titre originaire le droit d’auteur semble la plus efficace.

[47] Lire à propos KOUMANTOS (G.), « Faut-il avoir peur du droit moral ? », RIDA, avr. 1999, p. 87 ss.

 

[48] Sur toute cette problématique de l’abus du droit moral, Cf. F. POLLAUD-DULIAN, “Abus de droit et droit moral”, D.1993, chr.97 ; Ch. CARON, Abus de droit et droit d’auteur: contribution à l’étude de la théorie de l’abus de droit en droit français, Thèse de doctorat, Université de Paris 2, 1997, 584 p.

[49] Cass. Civ., 25 juin 1902, D.P. 1903, I, p. 5, concl. BAUDOUIN ; Cass civ., 1er  Mai 1945, D. 1945, jurisp., p. 285, note DESBOIS.

[50] Sur cette théorie, lire L. JOSSERAND, De l’abus des droits, éd. Arthur Rousseau, 1905, 89 p. ; L. JOSSERAND, « De l’esprit des droits et de leur relativité », 2ème éd., Paris, Dalloz, 1939, 454 p. ; ASSONNA SOKENG (U.L.), L’abus de droit d’auteur dans l’espace OAPI, Thèse de doctorat Ph.D en Droit Privé, Université de Dschang, 2023, 369 p.

[51] Il peut s’agir des créations industrielles purement techniques (invention, modèle d’utilité, nouvelle variété végétale, schéma de configuration) ou simplement ornementale (dessin et modèle industriel).

[52] Lire les articles 11 al. 1-a) de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 9 al. 1-a) de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 6 al. 1-a) de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 6 de l’Annexe IX de l’ABR sur les schémas de configuration, 12 al. 1-a) de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales. Cette caractérisation de la création industrielle de mission rejoint la position du législateur français sur la question (Voir à ce sujet l’article L. 611-7 du CPI).

[53] G. MESSADIE, Les grandes inventions du monde moderne, Bordas, 1989, p. 15.

[54] V. Art 11, al. 1-b) de l’Annexe I de l’ABR.

[55] Lire les articles 11 al. 1-b) de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 9 al. 1-b) de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 6 al. 1-b) de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels,12 al. 1-b) de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales.

[56] L’article 6 de l’Annexe IX sur les schémas de configuration (topographies) de circuits intégrés ne mentionne pas cette modalité spécifique.

[57] Voir la décision TGI Strasbourg, 1ére Civ., 1er décembre 2003, M. Muller c/ Sté Segip, PIBD 2004, III, p. 125, dans laquelle le dirigeant en désaccord avec le gérant a obtenu la rétrocession du brevet déposé au nom de la société.

[58] Il faudrait préciser que le législateur de l’OAPI ne fait pas de distinctions entre les salariés de secteurs différents. On peut d’ailleurs constater que l’ABR précise à ce sujet que les dispositions relatives aux créations industrielles salariées sont également applicables aux agents de l’État, des collectivités publiques et de toute autre personne morale de droit public, sauf dispositions particulières contraires (Voir à propos les articles 11 al. 6) de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 9 al. 6)  de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 6 al. 6)  de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 12 al. 6)  de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales). C’est dire qu’en l’absence de telles dispositions particulières, tous les salariés, tant du secteur public que privé, sont soumis aux prescriptions du législateur OAPI qui donne une précision sur le contenu des obligations auxquelles est soumis le créateur industriel salarié.

[59] Lire avec intérêt FABRE-MAGNAN (M.), De l’obligation d’information dans les contrats. Essai d’une théorie, Paris, L.G.D.J., 2014, 596 pp.

[60] Par exemple un inventeur indépendant.

[61] Lire les articles 11 al. 3) de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 9 al. 3)  de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 6 al. 3)  de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 12 al. 3)  de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales.

[62] Lire les articles 21 de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 19) de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 14) de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 15 de l’Annexe IX de l’ABR sur les schémas de configuration, 19 de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales.

[63] Voir les articles 61 de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 31) de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 38 de l’Annexe IX de l’ABR sur les schémas de configuration, 47 de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales.

[64] Paris, 24 mai 1994, PIBD 1994, III, p. 496.

[65] Com., 18 juin 1996, Ann. Propr. Ind. 1996, p. 175.

[66] Lyon, 18 novembre 1999, Ann. Propr. Ind. 2000, p. 156.

[67]Voir les articles 11 al. 1-a) de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 9 al. 1-a) de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 6 al. 1-a) de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 12 al. 1-a) de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales précités.

[68] Voir les articles 11 al. 1-b) de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 9 al. 1-b) de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 6 al. 1-b) de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 12 al. 1-b) de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales précités.

[69] Il faut souhaiter qu’en pratique, cette question de rémunération soit effectivement réglée par les conventions collectives afin d’éviter les conflits qui pourraient naître entre lesdites parties.

[70] V. Art. 74 de la loi no 92/007 du 14 août 1992, portant Code du Travail au Cameroun : (1) L’action en paiement du salaire se prescrit par trois (3) ans. A l’égard de laprescription, les indemnités liées à la rupture de contrat de travail sont assimilées au salaire.

(2) La prescription commence à courir à la date à laquelle les salaires sont exigibles. Elle cesse de courir, soit lorsqu’il y a réclamation écrite formulée par letravailleur en matière de paiement du salaire devant l’inspecteur du travail du ressort, soit lorsqu’il y a compte arrêté, cédule ou obligation ou citation en justicenon périmée.

[71] Cour de cassation française, ch. Soc., 26 janvier 2012.

[72] Sur le calcul de la rémunération supplémentaire en France, d’après l’arrêt bien connu Raynaud c/ Hoechst Roussel UCLAF (chambre commerciale de la Cour de cassation française, 21 novembre 2000) le montant de la rémunération supplémentaire doit être en rapport avec l’intérêt ou la valeur économique de l’invention. La jurisprudence récente est encore plus précise notamment dans la décision définitive Draka Comteq France (TGI de Paris, 10 novembre 2008), qui reconnaît, pour la première fois dans le secteur privé, un principe de rémunération constitué par un pourcentage du chiffre d’affaires et fondé sur les règles de calcul des rémunérations supplémentaires en vigueur dans la fonction publique conformément audit article R. 611-14-1, pour les inventions réalisées par les fonctionnaires. Toutefois, la décision récente Michel Gaumet c. Gemalto SA (Cour d’Appel de Paris, pôle 5, 2ème ch., 16 décembre 2011) relève que les dispositions des articles R. 611-14 et suivants n’ont pas vocation à s’appliquer aux inventions des salariés du secteur privé mais uniquement à celles des fonctionnaires et agents publics. V. Cabinet NUSS Strasbourg, La rémunération des inventeurs salariés pour les inventions de mission : prescription et calcul de la prime, Firefox HTML, consulté le 14-07-2014.

[73] Il s’agit là des stipulations contractuelles contraires au régime prédéfini par l’ABR mais dans un sens plus favorable aux salariés, ce qui éviterait de porter atteinte à la protection minimale accordée à ces salariés par le régime légal des créations industrielles réalisées par les employés.

[74] Voir d’une part l’article 35 de l’Annexe VII sur la propriété littéraire et artistique et d’autre part, en matière de propriété industrielle, les articles 11 al. 1 de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 9 al. 1 de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 6 al. 1 de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 12 al. 1 de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales.

[75] Voir note supra.

[76] Il faut en effet le rappeler, pour telles réalisations, les attributs patrimoniaux sont automatiquement cédés à l’employeur en raison de l’incessibilité du droit moral, leur propriété dans le domaine de la propriété industrielle appartient en totalité à l’employeur.

[77] Voir les articles 11 al. 5 de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 9 al. 5 de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 6 al. 5 de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 12 al. 5 de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales.

[78] S. LOSSONA, « Essai d’une théorie générale de la renonciation en droit civil », RTD Civ., 1912, p. 387 ; P. RAYNAUD, « La renonciation à un droit, sa nature et son domaine en droit civil », RTD Civ., 1936, p. 773 ; J. D. BREDIN, « Les renonciations au bénéfice de la loi en droit privé français », Travaux de l’Association HENRI CAPITANT, T.XIII, 1959-1960, Paris, Dalloz, 1963, p. 365.

[79] C. SEUNA, « L’auteur salarié après la promulgation de la loi du 14 août portant Code du travail », Revue Juridique Africaine, PUC, 1994, p. 185.

[80] Cass. 1ère civ., 7 juin 2006 : Juris-Data n° 2006-033861 JCP N 2006.

[81] C’est ce que véhicule le principe DE l’interdiction du pacte sur succession future.

[82] L’employé devant dans tous les cas produire une attestation de renonciation signée par l’employeur pour jouir des avantages de la création salariée sans risque de poursuites ou de revendication de la part de ce dernier.

[83] Paris, 5 avril 1990, Ann. Propr. Ind. 1991, p. 121, PIBD 1990, III, p. 447.

[84] Voir les articles 11 al. 4 de l’Annexe I de l’ABR sur les brevets d’invention, 9 al. 4 de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilités, 6 al. 4 de l’Annexe IV de l’ABR relative aux dessins et modèles industriels, 12 al. 4 de l’Annexe X de l’ABR sur les obtentions végétales.

[85] V. Art. 42 de l’Annexe VII de l’ABR. Cette exigence de l’écrit dans les contrats en droit d’auteur a été reprise par les législations nationales y relatives. V. dans ce sens l’article 22 al. 1 de la loi camerounaise No2000/011 du 19 décembre 2000 relative aux droits d’auteur et aux droits voisins ; l’article 62 de la loi sénégalaise n°2008-09 du 25 janvier 2008 ; l’article 34 de l’ordonnance-loi n°86-033 du 5 avril 1986 portant protection des droits d’auteurs et droits voisins en République Démocratique du Congo ; l’article 47 de la loi Tchadienne n°005/PR/2003 du 2 mai 2003 portant protection du droit d’auteur, des droits voisins et des expressions du folklore ; l’article 46 (a) de la loi malienne N° 8426/AN-RM du 07 juin 1984 modifiée par la loi no 94-043 du 13 octobre 1994; l’article 27 (1) de la loi ivoirienne, les articles 19 (1) et 41 (1) de la loi togolaise no 91-12, l’article 26 de la loi béninoise no 2005-30 du 05 avril 2006.

[86] V. les articles 36 al. 2 de l’Annexe I de l’ABR relative aux brevets d’invention, 31 al. 2 de l’Annexe II de l’ABR sur les modèles d’utilité, 30 al. 2 de l’Annexe III de l’ABR relative aux marques de produits ou de services, 24 al. 2 de l’Annexe IV relative aux dessins et modèles industriels, 17 al. 2 de l’Annexe V de l’ABR portant sur les noms commerciaux.

[87] Sur la question, lire M.-A. GUERRIERO, L’acte juridique solennel, Paris, LGDJ, 1975, 464 p.

[88]Ibid, p. 31 ss.

[89] Le législateur OAPI n’ayant pas donné de précisions sur le contenu de cet écrit, on suppose qu’il devrait contenir toutes les mentions que les usages et l’équité recommandent pour une bonne exécution du contrat entre l’employeur et l’auteur salarié.

[90] Voire Art. 42 de l’Annexe VII précité. Il est bon de noter tout de même que, bien que prévus pour les contrats sur les attributs patrimoniaux du droit d’auteur, les supports électroniques ne peuvent être utilisés qu’en conformité avec les législations nationales sur le droit d’auteur, qui pourraient imposer d’autres formes particulières. À titre d’exemple, l’article 41 (1) de la loi togolaise précitée précise que la cession doit être constatée par un acte authentique ou passé en la forme administrative sous peine de nullité.

[91] L’OHADA (Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires) est une organisation internationale instituée par le traité signé à Port-Louis (île Maurice) le 17 octobre 1993. Elle a pour objectif, au plan économique, le développement et l’intégration régional, ainsi que la sécurité juridique et judiciaire notamment par l’unification du droit des affaires des États membres. Elle compte actuellement 17 États membres : le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, le Congo (Brazzaville), la Côte d’Ivoire, le Gabon, la Guinée, la Guinée Bissau, la Guinée Equatoriale, le Mali, le Niger, la République centrafricaine, la République Démocratique du Congo (RDC), le Sénégal, le Tchad, le Togo et l’Union des Comores. Elle demeure, conformément à l’article 53 du traité, ouverte à l’adhésion de tout État membre de l’Union Africaine non-signataire du traité et de tout autre État non membre de l’Union Africaine invité à y adhérer du commun accord de tous les États parties.

[92] Écrit et signature électronique.

[93] Manuscrit ou non.

[94] L’article 82 de l’AU.DCG dispose à ce sujet que : « …Les documents sous forme électronique peuvent se substituer aux documents sur support papier et sont reconnus comme équivalents lorsqu’ils sont établis et maintenus selon un procédé technique fiable, qui garantit, à tout moment, l’origine du document sous forme électronique et son intégrité au cours des traitements et des transmissions électroniques… ».

[95] Selon l’article 83 de l’AU.DCG : « la signature électronique qualifiée est appliquée à un document et permet d’identifier le signataire et de manifester son consentement aux obligations qui découlent de l’acte.

Elle présente les caractéristiques suivantes … ».

[96] Au regard de l’article 84 de l’AU.DCG, « le certificat électronique employé en support de la signature électronique qualifiée est une attestation électronique qui lie des données afférentes à la vérification de signature à une personne et confirme l’identité de cette personne… ».

[97] Lire à ce sujet,  T. PIETTE-COUDOL, ” Le temps appliqué au droit des affaires dans les échanges électroniques professionnels ”, communication de l’atelier no 1 (la gestion du temps et l’utilisation des TIC dans la sécurisation des relations d’affaires : l’horodatage et ses relations avec la signature électronique) du séminaire organisé à l’Université Catholique d’Afrique Centrale (Yaoundé) par l’AEDJ les 13 et 14 juin  2012 sur « le temps et l’application du droit des affaires : regards croisés afro-européens.

[98] Selon cet article, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ».

[99] D. MAZEAUD, Loyauté, solidarité, fraternité : la nouvelle devise contractuelle ? Mélanges F.TERRE, Dalloz PUF-jurisclasseur, 1999, pp.603-634, p. 609.

[100] F. TERRE, P. SIMILER, Y. LEQUETTE, Les obligations, Dalloz, 9ème éd., 2005, no 440.

[101] D. MAZEAUD, op. cit., note 57, p. 612.

[102] J. LEFEVRE, L’obligation d’exploitation dans les contrats d’auteur, Mémoire de Master 2 sous la direction du Pr. A. LUCAS, Université de Nantes, 2011-2012, p. 23.

[103] D. MAZEAUD, Ibid, p. 614.

[104] Ibid, p. 617.

[105] Ibidem.

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